mercredi 20 février 2008

DRIlguilas Weila, président de l’association Timidria, est un pionnier de la lutte contre l'esclavage au Niger.


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Souleymane Saddi Maazou pour Syfia International (France)Le 07-12-2007 (Publié sur internet le 12-12-2007 ) Esclavage : La parole à Ilguilas Weila : ''En finir avec ces pratiques d'un autre âge''Pionnier de la lutte contre l'esclavage au Niger et président de l’association Timidria, Ilguilas Weila se félicite de voir les mentalités évoluer positivement dans son pays. Les chefs religieux musulmans commencent, eux aussi, à se mobiliser. Rencontre.
Syfia International : Comment vous est venue cette volonté de lutter contre les pratiques esclavagistes au Niger ?Ilguilas Weila : Le souci de restaurer la dignité humaine m’a poussé avec mes camarades à embrasser cette lutte que je trouve noble. J’ai grandi dans l’Azawak (nord-ouest du Niger), une zone où le système de classes sociales est ancré dans les mentalités. Aux côtés des nobles vivent des moins nobles, des hommes libres et des esclaves. Depuis ma jeunesse, les conditions de vie difficiles de ces esclaves m’ont beaucoup préoccupé. J’ai vu les souffrances qu’ils enduraient. Dans cette zone, l’esclave était considéré comme une bête et travaillait pour son maître de jour comme de nuit sans aucune rémunération. Pour un rien, il recevait des coups de bâton. Insultes, privation de sommeil, gifles et refus d’assistance faisaient partie de son quotidien. Certains jours, il était même privé de ses devoirs religieux.Cette servilité et le silence complice des populations m’ont révolté. Avec le vent de la démocratie en 1991, nous avons créé l’association Timidria (fraternité en tamacheq, Ndlr) pour sensibiliser les gens. Il y a aussi eu la création d'écoles communautaires pour les enfants de classes serviles. Nous assistons juridiquement ces personnes, en portant à leur connaissance les conventions internationales sur les droits de l’Homme que le Niger a ratifiées.En 16 ans de lutte, nous avons libéré 310 esclaves. Mieux, les mentalités sont en train de changer. Qui a connu la région d’Azawak dans les années 1960 sait qu’aujourd’hui les choses évoluent positivement. Les gens sont en train d’ôter de leur tête cette idée saugrenue de considérer tous ceux qui ont la peau noire comme des esclaves, et ceux qui ont la peau blanche comme des nobles.Syfia International : Quelles sont les formes de l'esclavage au Niger aujourd'hui ? Ilguilas Weila : Il y a 10 groupes ethnolinguistiques au Niger et chaque groupe pratique l’esclavage à sa façon. Au cours de nos 16 années de lutte, nous avons classifié l’esclavage en trois grands groupes.D’abord, l’esclavage actif, qui se pratique dans les communautés nomades. Esclaves et maîtres vivent ensemble, les esclaves travaillant à longueur de journée. Ils conduisent les animaux aux pâturages, font les travaux domestiques et exploitent les terres cultivables. L’esclavage passif est lui vécu en zone sédentaire. Dans les parties ouest et sud du Niger, presque chaque village a son dabey, son quartier où vivent, à l’écart de leurs maîtres, des esclaves. Ces deux formes d’esclavage ont des traits communs. L’esclave est la propriété du maître et n’a pas le droit de posséder ne serait-ce qu’un lopin de terre. Ce sont pourtant, eux, les plus grands exploitants, mais pour le compte de leurs maîtres.Enfin, il y a ce que nous appelons l'esclavage moderne, qui concerne les petites filles domestiques.Syfia International : Quel bilan faites-vous, 4 ans après l’adoption de la loi criminalisant l’esclavage au Niger ? Ilguilas Weila : A notre niveau, le bilan est mitigé, voire négatif. Nous avions en effet fondé beaucoup d’espoir sur cette loi qui prévoit 3 à 5 années d’emprisonnement pour toute personne reconnue coupable de pratique esclavagiste. Nous avions bataillé pour son adoption par l’Assemblée nationale et sa promulgation par le président de la République. Nous sommes la première république en Afrique de l’Ouest à posséder une telle loi. La commission nationale des droits de l’Homme et des libertés fondamentales a même fait sa vulgarisation à travers tout le pays. Malheureusement, dans la pratique, cette loi est inexistante. Beaucoup de personnes continuent à vivre en silence la servitude, par ignorance des textes. C’est pourquoi nous réfléchissons à des mécanismes permettant la mise en œuvre effective de cette loi.Syfia International : Qu'est-ce qui explique, selon vous, l’implication récente des oulémas (chefs religieux musulmans, Ndlr) dans la lutte contre les pratiques esclavagistes ? Ilguilas Weila : Depuis que nous avons commencé notre combat, nous nous sommes heurtés à ce problème de religion. Si vous dites à quelqu’un d’arrêter ses pratiques esclavagistes honteuses parce que le Niger a signé des conventions internationales les interdisant, il vous répondra que c’est grâce à l’islam qu’il a des esclaves, car il les a hérités de ses grands-parents.C’est pour cette raison que nous avons réuni en novembre dernier à Niamey, à l’occasion d’un atelier national, des oulémas venus de toutes les régions du Niger. Ils nous ont prouvé, Coran et Sunna (source législative du Coran, Ndlr) du Prophète à l’appui, que l’islam n’a jamais fait la promotion de l’esclavage. Nous leur avons demandé de nous aider à faire comprendre aux gens que ces pratiques sont anormales et contraires à l’islam. Les oulémas, tout comme la société civile, sont aujourd’hui nos alliés dans cette lutte.
Souleymane Saddi Maazou pour Syfia International (France)
Les opinions exprimées et les arguments avancés dans cet article demeurent l'entière responsabilité de l'auteur-e.Elles ne reflètent pas nécessairement les vues de Planète Urgence.
Au Niger, l'esclavage n'est pas aboli
Bilal, qui pose son bâton de berger en travers des épaules, la tête protégée du soleil dans son cheich noir, a marché une nuit entière pour conduire le troupeau vers l'un des rares puits de la région. Il attend son tour pour faire boire les animaux, et repartira le soir en sens inverse. Le troupeau que garde le petit homme maigre ne lui appartient pas. Pas plus qu'il ne se possède lui-même. S'il reçoit chaque mois une poignée de francs cfa pour de maigres dépenses personnelles, ce Nigérien noir est, comme des milliers d'autres, la propriété d'un Nigérien blanc, nomade arabe ou berbère. La réduction des Noirs en esclavage est une longue et douloureuse histoire. Outre la traite atlantique organisée par les Occidentaux, il y eut un esclavage pratiqué par des Noirs à l'égard d'autres Noirs ainsi qu'une traite négrière arabe et berbère, qui s'est poursuivie sans discontinuer du Moyen-Age au début du XXe siècle. Le présent porte les marques de ce passé. Aujourd'hui, dans les zones pastorales sahéliennes, les descendants d'esclaves restent des inférieurs. Et continuent, pour certains, d'appartenir corps et âme aux grandes familles d'éleveurs nomades. Ils subissent coups et mauvais traitements, doi... Article de 561 mots
Antoine de RavignanAlternatives Internationales - n°34 - Mars 2007

mercredi 6 février 2008


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Voici les esclaves du 21ème siècle: la forme la plus ancienne et la plus brutale du travail forcé. Ces femmes et ces enfants, qui viennent d’être vendus, quittent leurs villages dans le sud du Soudan pour aller rejoindre leurs nouveaux maîtres dans le nord. Oumou, lui, est un ancien esclave: il est libre depuis peu, mais il n’a pas oublié ce qu’il a vécu en captivité dès son plus jeune âge.
Oumou, ancien esclave
Mon maître m’avait même mis des chaînes aux pieds, parce qu’un jour j’avais laissé s’échapper les chevaux que je gardais. Et j’ai porté ces chaînes pendant deux ans.
On ne dispose pas de statistiques officielles sur le nombre actuel d’esclaves en Afrique occidentale, mais on sait que l’esclavage est loin d’avoir disparu dans des pays comme le Niger, le Soudan et la Mauritanie.
Oumou, ancien esclave
Mon maître m’avait même mis des chaînes aux pieds, parce qu’un jour j’avais laissé s’échapper les chevaux que je gardais. Et j’ai porté ces chaînes pendant deux ans.
On ne dispose pas de statistiques officielles sur le nombre actuel d’esclaves en Afrique occidentale, mais on sait que l’esclavage est loin d’avoir disparu dans des pays comme le Niger, le Soudan et la Mauritanie. On ne dispose pas de statistiques officielles sur le nombre actuel d’esclaves en Afrique occidentale, mais on sait que l’esclavage est loin d’avoir disparu dans des pays comme le Niger, le Soudan et la Mauritanie.
Dans un rapport et un film récents, l’Organisation internationale du Travail, l’OIT, dénonce précisément la réalité de l’esclavage moderne et propose des actions concrètes pour le combattre. Dans un rapport et un film récents, l’Organisation internationale du Travail, l’OIT, dénonce précisément la réalité de l’esclavage moderne et propose des actions concrètes pour le combattre.
Comme au Niger, par exemple. Ici, les chefs de tribu traditionnels ont toujours une grande influence sur le fonctionnement de la société. C’est pourquoi l’OIT s’efforce d’obtenir leur soutien dans la lutte contre le travail forcé. Comme au Niger, par exemple. Ici, les chefs de tribu traditionnels ont toujours une grande influence sur le fonctionnement de la société. C’est pourquoi l’OIT s’efforce d’obtenir leur soutien dans la lutte contre le travail forcé.
Chef Amirou Nohou
Nous comptons vraiment sur l’OIT pour nous aider à renforcer notre autorité. C’est très important si nous voulons venir à bout de l’esclavage.
La campagne de l’OIT, axée sur la sensibilisation des enfants scolarisés et de leurs professeurs, vise à encourager l’esprit de tolérance et le respect entre les différentes communautés ethniques et religieuses du pays. Mais l’éradication de l’esclavage passe aussi par la lutte contre la pauvreté.
Chef Amirou Nohou
Nous comptons vraiment sur l’OIT pour nous aider à renforcer notre autorité. C’est très important si nous voulons venir à bout de l’esclavage.
La campagne de l’OIT, axée sur la sensibilisation des enfants scolarisés et de leurs professeurs, vise à encourager l’esprit de tolérance et le respect entre les différentes communautés ethniques et religieuses du pays. Mais l’éradication de l’esclavage passe aussi par la lutte contre la pauvreté. La campagne de l’OIT, axée sur la sensibilisation des enfants scolarisés et de leurs professeurs, vise à encourager l’esprit de tolérance et le respect entre les différentes communautés ethniques et religieuses du pays. Mais l’éradication de l’esclavage passe aussi par la lutte contre la pauvreté.
Bazoum Mohamed, député
Soyons réalistes: si l’on veut vraiment éliminer l’esclavage, il faut promouvoir le développement et la création d’emplois dans les zones rurales, de façon à aider les personnes qui sont exposées à cette forme primaire de dépendance qu’est l’esclavage.
Certes, les esclaves modernes ne sont plus enchaînés et ne travaillent plus dans des plantations, mais, au Niger comme dans d’autres pays, ils sont des millions d’hommes, de femmes et d’enfants à subir le travail comme une condamnation à perpétuité.
Bazoum Mohamed, député
Soyons réalistes: si l’on veut vraiment éliminer l’esclavage, il faut promouvoir le développement et la création d’emplois dans les zones rurales, de façon à aider les personnes qui sont exposées à cette forme primaire de dépendance qu’est l’esclavage.
Certes, les esclaves modernes ne sont plus enchaînés et ne travaillent plus dans des plantations, mais, au Niger comme dans d’autres pays, ils sont des millions d’hommes, de femmes et d’enfants à subir le travail comme une condamnation à perpétuité. Certes, les esclaves modernes ne sont plus enchaînés et ne travaillent plus dans des plantations, mais, au Niger comme dans d’autres pays, ils sont des millions d’hommes, de femmes et d’enfants à subir le travail comme une condamnation à perpétuité.
Miguel Shapira, Télévision de l’OIT A des milliers de kilomètres de Niamey, Niger, au siège de l’Organisation internationale du Travail, à Genève, l’élimination du travail forcé est toujours un des objectifs prioritaires de l’OIT, comme elle l’était déjà lors de sa fondation il y a huit décennies. Après tant d’années, le travail forcé devrait appartenir au passé, mais, comme nous venons de le voir, il est toujours bien d’actualité.
Miguel Shapira, Télévision de l’OIT A des milliers de kilomètres de Niamey, Niger, au siège de l’Organisation internationale du Travail, à Genève, l’élimination du travail forcé est toujours un des objectifs prioritaires de l’OIT, comme elle l’était déjà lors de sa fondation il y a huit décennies. Après tant d’années, le travail forcé devrait appartenir au passé, mais, comme nous venons de le voir, il est toujours bien d’actualité.